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Tribune. «Aux côtés d’Anthony Smith, des inspecteurs du travail et des travailleuses de l’invisible»

Anthony Smith, inspecteur du travail et militant CGT, a demandé à un employeur d’une association d’aide à domicile à Reims de prendre des mesures de prévention propres à protéger les salarié·e·s contre le Covid-19.

Pour avoir fait son travail afin de protéger des travailleuses précaires mais également les personnes fragilisées au domicile desquelles elles interviennent, cet inspecteur est aujourd’hui suspendu depuis plus de 3 mois par le ministère du travail.

Au détriment de l’intérêt général

Des pressions et collusions entre l’employeur, le président du conseil départemental et sa hiérarchie ont eu pour effet de le mettre sur la touche pour mieux protéger les intérêts économiques de cette association au détriment de l’intérêt général et du droit à la santé des salarié·e·s, majoritairement des femmes !

Le ministère poursuit son acharnement et le convoque en commission disciplinaire ce mardi 21 juillet!

Cette mise à pied et cet acharnement sont facilités par le fait que les droits ici bafoués qu’Anthony Smith a cherché à rétablir dans le cadre de ses missions d’inspecteur du travail, l’ont été à l’endroit de femmes travailleuses précaires, invisibles et dévalorisées socialement.

400 000 aides à domicile en première ligne

Pour nous, travailleuses, militantes syndicales, associatives et résolument féministes, cette affaire est révélatrice une fois de plus d’une politique qui est à total contre-sens des valeurs d’égalité entre les femmes et les hommes que nous portons. Les métiers féminisés ne doivent pas être moins protégés au prétexte qu’ils sont féminisés.

Dans le cadre de la crise sanitaire, les aides à domicile ont été surexposées au risque de covid-19, n’ayant pas toujours eu de masques de protection, de surblouses, de lingettes. Elles doivent être protégées à l’image de ce qu’a pu décider notamment la justice dans le Nord.

Les plus de 400 000 aides à domicile, en premières lignes durant la crise, sont les « grandes oubliées » d’aujourd’hui et demain. Elles sont à 97% des femmes, sous-payées, aux conditions de travail extrêmement difficiles, subissant isolement professionnel, précarité et temps partiel imposé.

Des métiers féminisés… et dévalorisés

Elles sont précarisées aussi bien dans le secteur privé que dans la Fonction publique, 17,5% d’entre elles, vivent sous le seuil de pauvreté. Une aide à domicile perçoit 972 euros brut en équivalent temps plein avec 16 ans d’ancienneté. Et rares sont celles qui travaillent à temps plein : 89% sont à temps partiel le plus souvent imposé. Elles ne bénéficient pas d’évolution de carrière. Ces emplois sont très souvent occupés par des femmes ayant repris un emploi après une interruption ou une reconversion : l’âge médian est de 47 ans et une aide à domicile sur 3 a plus de 50 ans.

Elles font partie de ces métiers du soin et du lien aux autres, très féminisés qui sont dévalorisés. Cette dévalorisation est une dimension importante des inégalités salariales entre les femmes et les hommes qui sont encore de plus de 26%. On ne reconnaît pas leur qualification, ni l’expertise et la technicité, ni le réel degré de responsabilités, ni enfin l’importance des contraintes physiques et nerveuses de ces emplois. C’est parce que ces emplois sont très féminisés et s’appuient sur des compétences considérées comme « naturelles » pour les femmes (aider, soigner, éduquer, nettoyer, écouter…), qu’ils sont sous-payés.

Elles sont de ces travailleuses invisibles à l’utilité sociale indispensable que la crise sanitaire a mise en lumière.

Pourtant, la revalorisation de leur salaire et de leur carrière, la revalorisation de leurs qualifications professionnelles et de la formation professionnelle qui conduit à ces métiers, ne sont toujours pas à l’agenda du gouvernement !

À la hauteur de leur utilité sociale

Les aides à domicile travaillent au service et soignent des personnes fragilisées, âgées, majoritairement des femmes elles aussi.

Alors que leur rôle est essentiel, que leur métier fait partie des enjeux fort des sociétés de demain, que leur travail est aussi un levier d’émancipation des femmes qui sont majoritairement des aidant·e·s, les politiques d’austérité et d’asphyxie des services publics entravent ces exigences d’égalité entre les femmes et les hommes.

Nous, travailleuses, militantes syndicales et associatives et résolument féministes, nous sommes aux côtés de toutes ces travailleuses invisibles qui doivent bénéficier d’une revalorisation de leur métier, à la hauteur de leur utilité sociale.

Nous sommes aux côtés d’Anthony Smith et de tous les inspecteurs et inspectrices du travail dont les missions sont de protéger toutes et tous les salarié·e·s !

Nous exigeons la réintégration d’Anthony dans ses fonctions et l’abandon de toute poursuite disciplinaire. Nous appelons à rejoindre le rassemblement le mardi 21 juillet à 12h30 à Paris (14 avenue Duquesne, 7e arrondissement) pour le dire haut et fort !


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