Tests salivaires à l'école : et maintenant les enseignants doivent jouer les apprentis infirmiers

Depuis le 1er mars, les écoliers et collégiens de la région parisienne sont soumis à des dépistages salivaires. Les syndicats dénoncent le manque de moyens de cette campagne. Dans certains départements par exemple, les équipes enseignantes sont mises à contribution après une « formation » expresse délivrée par un personnel de laboratoire d’analyses médicales. Décryptage d’un dépistage compliqué.

Mis à jour le 19 février 2024 à 15:51

Depuis le 22 février, le dépistage salivaire est effectif dans les établissements scolaires. Avec cette nouvelle méthode pour tester le Covid, moins invasive que les tests PCR, le gouvernement entend casser les chaînes de contamination dans les écoles. En visite dans une classe de primaire de Lavoncourt, en Haute-Saône, le ministre de l’Éducation nationale a martelé l’objectif : « Les écoles de France doivent rester ouvertes. » Pour ce faire, il mise sur un dépistage massif, notamment là où le virus frappe le plus fort avec, à compter du 15 mars, 300 000 tests réalisés par semaine. Une opération de communication, dénonce le Snes/FSU, premier syndicat des personnels enseignants du second degré. « La discrétion autour de cette visite, le caractère rural et socialement peu conflictuel de la région expliquent sans doute ce choix étrange en période de Covid », affirme le syndicat enseignant. Mais, surtout, il dénonce une campagne de dépistage au rabais. « Sur les 1,3 million de tests antigéniques prévus depuis novembre 2020 (dans les collèges et lycées – NDLR), seuls 200 000 ont été effectués », rappelle le Snes.

Une « formation » expresse

Ce lundi, c’était au tour des élèves de la région Île-de-France de bénéficier des tests salivaires, moins intrusifs que les tests antigéniques. Et le ministère entend bien élargir le dispositif aux écoles maternelles, avec l’objectif d’atteindre 40 000 tests salivaires par semaine en Île-de-France dès ce mois de mars et, à terme, 60 000 tests hebdomadaires. Mais, là où le bât blesse, pour le Snes, c’est lorsque le ministère de l’Éducation compte sur le bon vouloir d’enseignants volontaires pour pratiquer les dépistages.

Les prélèvements sont supervisés par le personnel des laboratoires intervenant dans l’école, qui viennent sur place avec leur matériel. Des agents des rectorats sont mobilisés, ainsi que des « médiateurs de lutte anti-Covid ». Sauf que, sur le terrain, dans certains départements, les équipes enseignantes sont mises à contribution après une « formation » expresse délivrée par un personnel de laboratoire d’analyses médicales. « Cet épisode illustre, à nouveau, le manque de personnel de soin et de santé au sein des écoles maternelles et élémentaires, pourtant révélé au grand jour depuis le début de cette pandémie !! » tempête le Snuipp, principal syndicat du premier degré. Pour la secrétaire générale du syndicat, Guislaine David, l’affaire est simple : « Nous demandons au ministère des personnels soignants, de laboratoire, des infirmiers en nombre suffisant, et que l’on cesse de faire appel au personnel enseignant. »

Une organisation défaillante

Manque d’ambition, insiste le Snuipp, qui estime que cette politique de test « reste très loin d’un dépistage massif des élèves, comme de l’ensemble des personnels, permettant une surveillance épidémiologique régulière des écoles et des établissements scolaires ». Le syndicat pointe du doigt l’organisation du dispositif. En amont, les enseignants doivent recueillir l’accord écrit des parents et des informations sur leur numéro de Sécurité sociale. « Ce qui va reposer pour beaucoup sur les directeurs, dont la tâche de travail est déjà énorme, et peut poser aussi question sur la sensibilité des informations transmises, par exemple pour une famille bénéficiaire de la CMU », explique le syndicat. Les enseignants doivent superviser le déroulement des tests. Mais quid des autres élèves, pendant ce temps ? De ceux dont les familles refusent le test ? Comment garantir la sécurité sanitaire des enseignants ? Quel nettoyage des locaux servant aux tests, où les enfants auront postillonné sans réserve ? Beaucoup de questions restent en suspens. Côté ministère, on se montre. Mais dans les faits, c’est le flou total.

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